1. La durée de vos nuits - Dormez-vous suffisamment ?
Naturactive : – Lors de la dernière Journée Nationale du Sommeil, vous avez pointé la tendance générale à écourter sa durée. Quels sont les facteurs en cause ?
Pr Joël Paquereau : – La réduction du temps de sommeil est allée de pair avec le développement de l’éclairage puis de la télévision. La généralisation des ordinateurs constitue un nouvel élément dans ce sens, car les pratiquants du jeu sur écran ou de la navigation en ligne restent actifs très tard le soir. L’organisation du travail est aussi en cause - travail posté, travail de nuit, horaires irréguliers… - car lorsque le rythme activité/sommeil ne correspond pas aux horaires attendus par l’organisme, le temps de sommeil est réduit. Tout ceci explique la réduction globale de la durée du sommeil depuis une cinquantaine d’années.
– Comment évaluer la durée de sommeil nécessaire ?
– Les vacances sont le bon moment pour observer la durée dont vous avez besoin. Après une dizaine de jours d’adaptation, vous retrouvez votre rythme physiologique. Entre le moment où vous ressentez l’envie de dormir et celui où vous vous éveillez reposé, il faut en général 1h20 de plus que d’ordinaire ! Soit 8h20 en moyenne. Naturellement, la durée du sommeil varie selon les individus ; il y a les petits et les gros dormeurs.
– Que se passe-t-il lorsque j’ampute mon temps de sommeil ?
– Si la réduction est importante mais limitée sur une nuit ou deux, vous serez somnolent le lendemain, avant de récupérer les jours suivants. Une dette aiguë de sommeil peut être dangereuse au moment de prendre le volant – cas fréquent la veille des vacances ! Quand la réduction du temps de sommeil est permanente, vous souffrez d’une dette chronique. L’effet est plus subtil et plus pervers.
– La dette chronique altère aussi la vigilance ?
– Si vous manquez de sommeil pendant des semaines, des mois, voire des années, vous êtes atteint progressivement par une somnolence à laquelle vous ne prêtez pas attention : la tendance à s’assoupir devient presque normale. On constate en fait un retentissement sur l’organisme lui-même. Selon des études récentes, le défaut de sommeil peut induire des perturbations métaboliques, à l’origine de surpoids, de diabète, d’hypertension… ce qui augmente notamment les risques de maladies cardio-vasculaires.
– Quel est l’impact sur la santé des plus jeunes ?
– Chez les enfants, un sommeil de mauvaise qualité peut entraîner un retard de croissance. On constate aussi des difficultés d’apprentissage, car le sommeil est en relation avec la mémoire. Chez les ados qui se couchent tard, la dette de sommeil a un impact méconnu sur la vie scolaire.
– Et sur la vie sociale des adultes ?
– Au travail, les effets les plus évidents sont l’irritabilité, le défaut d’attention et de concentration… Les statistiques révèlent que la somnolence est une des premières causes d’accidents sur autoroute. C’est aussi une source d’accidents au travail et chez soi.
– En conclusion, personne ne peut écourter ses nuits impunément ?
– Il y a une hygiène du sommeil à respecter. Informez-vous et demandez conseil. Un simple changement de comportement suffit souvent à améliorer le vécu quotidien.
2. La qualité de vos nuits - Que faire pour mieux dormir ?
Naturactive : – Pour autant, la durée du séjour au lit ne suffit pas à garantir un sommeil satisfaisant en quantité et en qualité.
Pr Paquereau : – De nombreux facteurs peuvent affecter le sommeil, fréquemment liés au comportement ou à l’environnement : horaires décalés, stress professionnel, sédentarité, bruit ambiant… Il existe aussi des pathologies du sommeil : c’est le cas de l’insomnie, de l’apnée du sommeil, du syndrome des jambes sans repos, de l’hypersomnie… Pour ces maladies, le diagnostic du médecin généraliste est essentiel et l’aide d’un spécialiste souvent nécessaire.
– Quelles sont les modalités thérapeutiques en cas d’insomnie ?
– En fonction des plaintes de la personne insomniaque, on commence par rechercher l’origine du problème. On conseille en général une thérapie cognitive et comportementale, avec de bons résultats. La personne peut s’aider d’une prise de plantes, de plus, la prise crée une sorte de rituel qui facilite l’endormissement. Les hypnotiques ne sont prescrits qu’en dernier recours, et pour une durée strictement limitée, en raison des risques d’accoutumance et de dépendance.
– Que conseillez-vous à quelqu’un qui consomme couramment des somnifères ?
– La réduction des hypnotiques et le sevrage sont à envisager dans le cadre d’un accord entre le patient et son médecin. Tout repose sur le dialogue, car la personne doit comprendre l’intérêt du sevrage.
– La phytothérapie peut alors constituer une alternative et une aide ?
– Oui, si la prise en charge par la phytothérapie s’accompagne d’une explication de la part du médecin ou du pharmacien. C’est la condition pour que le traitement par les plantes montre son efficacité.