Naturactive : - Pourquoi avoir recommandé « 5 fruits et légumes par jour » ?
Christian Latgé : - La recommandation de l’ANSES « 5 fruits et légumes par jour », annoncée il y a une quinzaine d’années et relayée par l’OMS, a acquis aujourd’hui une aura mondiale. Il s’agissait moins d’augmenter la consommation de végétaux que d’arrêter la chute que les spécialistes craignaient ; et cela a fonctionné ! En terme de santé, on a constaté que cette recommandation amenait indéniablement des bénéfices sur les grandes pathologies : les cancers, les maladies cardio-vasculaires, le diabète… Et l’on remarquait même qu’en augmentant, c’est-à-dire en passant de 5 à 8 fruits et légumes par jour, les bénéfices augmentaient également. Plus intéressant encore : cette recommandation a eu aussi de l’intérêt pour d’autres types de pathologies, qui sont en général plus difficiles à améliorer via l’alimentation, comme les affections ORL, les troubles du sommeil, les troubles digestifs… On peut donc dire que la consommation de fruits et de légumes, équilibrée, quotidienne et conséquente a un impact très positif pour la santé du quotidien ! Un autre avantage : quand vous choisissez d’augmenter la part de végétaux dans votre alimentation, vous le faites au détriment d’autres aliments souvent plus gras et sucrés qui, pour le coup, ont un impact très négatif pour la santé.
- Qu’y a-t-il de si précieux au cœur des végétaux ?
- Dans les années 80, il a été mis en évidence que les fruits et les légumes contenaient énormément de composés, appelés phytonutriments, qui en étant absorbés, venaient certainement jouer un rôle physiologique majeur. Un déficit dans ce domaine ne se voyait pas tout de suite, car l’organisme était capable de compenser ponctuellement. Par contre à long terme, on remarquait un manque non seulement nutritionnel, mais aussi protecteur. Cette nuance est très importante et a orienté de nombreuses recherches.
- Parlez-nous de l’action protectrice des végétaux…
- Pendant longtemps, nous pensions que consommer des fruits et légumes était intéressant à cause de leur richesse en antioxydants qui ont une action sur les radicaux libres. En fait, c’est beaucoup plus complexe et ingénieux que ça ! Ces éléments végétaux influencent la réponse génétique en favorisant l’augmentation de la synthèse d’enzymes antioxydantes. Autrement dit, le végétal n’a pas seulement un effet direct, il y a aussi un effet indirect. Avant, nous pensions aussi être génétiquement programmés pour avoir tel type de réponse, mais ce n’est pas complètement le cas. Parmi l’ensemble des facteurs de notre environnement, appelé l’exposome - la pollution, le stress, les modes de vie… - l’alimentation est vraiment le plus important. Il faut bien comprendre que par notre façon de manger, on ne joue pas sur notre génome, mais sur l’expression de notre génome : une merveilleuse façon d’optimiser nos capacités !
- Par exemple ?
- Quand vous surconsommez des matières grasses, l’organisme fait un certain nombre de synthèses pour éviter l’oxydation de ces acides gras et éviter la formation de plaques d’athérome. Consommer des fruits et des légumes en parallèle va booster cette production via la production de certaines enzymes protectrices. Dans un autre domaine, l’alimentation vient compenser l’agression liée à une exposition intense et régulière au soleil. Le rôle protecteur des végétaux concerne tout l’organisme et s’applique dans tous les champs de la santé.
- Vous dites que notre alimentation s’appauvrit en phytonutriments…
- En effet, via la technologie agroalimentaire, depuis 30 ou 40 ans, des modifications très fortes sont allées dans le sens d’une perte de phytonutriments. D’abord, on a sélectionné des plantes vis-à-vis de leur capacité à croître rapidement et à être très productrices. Ces organismes sélectionnés, au lieu de mettre de l’énergie à fabriquer des phytonutriments, mettent leur énergie à faire de l’amidon en grande quantité. Cette pauvreté en éléments protecteurs a été compensée par l’emploi de traitements phytosanitaires : un véritable cercle vicieux. On s’est donc retrouvé rapidement avec des variétés de céréales, de fruits et des légumes, des sélections de semences faiblement productrices de phytonutriments. Une autre problématique : aujourd’hui, on raffine de plus en plus. Par exemple, le blé qui est amené à la coopérative est « cracké » : vous n’achetez plus du blé, mais des maltodextrines, de l’amidon de blé, du son de blé, du germe de blé … La notion de matière première a explosé. En segmentant et en coupant, le cracking élimine ou dilue une bonne partie des phytonutriments. Pour finir, nous avons diminué notre apport calorique quotidien.
- En quoi, manger moins impacte l’apport de phytonutriments ?
Pendant longtemps, nous affirmions qu’un homme consommait 3 000 kilocalories et une femme 2 800 kilocalories. Aujourd’hui tout le monde se situe entre 2 000 et 2 200 kilocalories, car nous sommes plus sédentaires ; nous vivons dans un milieu plus chaud ; nos besoins énergétiques sont moins importants. C’est mathématique : si notre densité nutritionnelle diminue, notre capacité d’apports en vitamines, en micronutriments et en phytonutriments diminue en même temps. Un tiers de moins, ce n’est pas négligeable ! Ceux qui travaillent à l’extérieur, qui se dépensent beaucoup, et qui mangent par conséquent en plus grosse quantité ne sont pas impactés par cette baisse en éléments essentiels. A contrario une jeune fille qui réduit ses apports caloriques, va être très vite en zone de carence au niveau des vitamines, des protéines, des phytonutriments.
- Comment évaluer sa consommation de phytonutriments ?
- Quand on a l’impression de ne pas manger suffisamment de végétaux, identifier les déficits me semble capital. À l’inverse, même en étant « un gros mangeur », il est toujours possible de rectifier ou d’améliorer certaines tendances. Dans les deux cas, il s’agit ni plus ni moins d’œuvrer pour sa santé. Pour faire le point, il existe le Phyto’scopeTM. Sous forme de questionnaire individualisé, cet outil est en libre accès sur le site de la marque Naturactive. En plus d’identifier les manques, des recommandations sont proposées pour rester en bonne santé dans différents domaines. Derrière chaque recommandation d’aliments ou de plantes, il y a de solides études scientifiques à l’appui. On peut répondre au questionnaire sans avoir d’objectif particulier, si ce n’est par curiosité et pour mieux se connaître. Prendre du temps pour réfléchir à ses comportements alimentaires, c’est déjà beaucoup. C’est surtout l’occasion de réaliser combien le végétal au sens large peut jouer un rôle sur notre santé… On ne le dira jamais assez !